UCL/FLTR - Département d'études grecques, latines et orientales (GLOR)


Institut Orientaliste:
Centre d'Études sur Grégoire de Nazianze

La tradition indirecte grecque
des discours de Grégoire de Nazianze


par Caroline MACÉ



L'étude de la tradition indirecte des œuvres de Grégoire de Nazianze a pris une place de plus en plus grande dans le projet d'édition critique et d'analyse de ses discours. Cet effort est proportionnel à l'importance quantitative et qualitative de cette tradition protéiforme. La gamme sur laquelle le terme vague de tradition indirecte peut jouer s'étend entre deux bornes, qui sont l'éducation et la création. À tort ou à raison, Grégoire de Nazianze est considéré comme l'auteur le plus cité, après la Bible, dans la littérature byzantine, donc celui qui a le plus fécondé un art, où pour être soi-même il faut d'abord ressembler à quelqu'un d'autre. Cette fécondité créatrice tire sa source de, en même temps qu'elle débouche sur, une culture commune, perpétuée par l'éducation. De nombreux éloges (de Georges de Pisidie, de Théodore Studite, de Jean Mauropous, de Théodore Métochite etc.), commentaires (du Pseudo-Nonnos, de Maxime le Confesseur, de Jean Damascène, de Photius, de Basile le Minime, de Michel Psellos etc.), florilèges (florilèges conciliaires ou doctrinaux, Sacra Parallela, florilèges sacro-profanes etc.), lexiques, mathémataires et traités rhétoriques (Jean Sicéliote) consacrent une large part à Grégoire de Nazianze, à la fois le Théologien de Byzance et sa "source suprême d'inspiration stylistique", pour reprendre les mots d'I. Sevcenko.

G. Steiner a critiqué, tout en y participant lui-même, la prolifération du commentaire, parasite de l'œuvre, et la "cité du commentaire" qui est comme un palais de glaces se renvoyant à l'infini les reflets d'un original insaisissable, ou comme une poupée russe en forme de savant qui regarde dans un microscope un autre savant qui regarde dans un microscope un autre savant etc. L'étude de la production byzantine, savante, technique, littéraire, artistique, qui s'est nourrie de Grégoire de Nazianze au fil des siècles peut cependant, par un juste retour, rendre à Grégoire ce qui est à lui, et ce de deux manières complémentaires. Un examen philologique de la tradition indirecte ancienne permettra de situer dans le temps et dans l'espace des états de texte identifiés dans la tradition directe. Cela constitue un apport précieux au travail de l'éditeur, confronté à des manuscrits grecs, dont on sait qu'ils avouent rarement d'où ils viennent. L'autre angle d'attaque est celui de l'histoire de la réception culturelle et de l'intertextualité. Ce type d'approche fait surgir des questions diverses: comment et pourquoi une œuvre littéraire se sert-elle d'une autre œuvre littéraire? comment et pourquoi Grégoire de Nazianze est-il demeuré un point de référence fixe à un horizon byzantin transformé par le passage du temps et les bouleversements de ses frontières géographiques et idéologiques?

Les deux types d'analyses, si différents qu'elles puissent être, nécessitent la même mise en œuvre au départ: elles ont besoin d'une base de données qui tende à l'exhaustivité et qui permette une mise en contexte. La première étape du travail consiste donc à récolter les données qui serviront à ces analyses (et à d'autres qui seraient à imaginer), d'une manière qui allie à la fois la rigueur et la souplesse, la tentation de la complétude et le pragmatisme qui accepte l'inachèvement inévitable et pare au plus pressé. Une question de fond se pose dès les préambules: où s'arrête l'allusion et où commence la citation?

Une recherche d'une telle envergure doit s'appuyer sur les travaux savants de nombreux spécialistes. Le Centre d'Études sur Grégoire de Nazianze bénéficie de plusieurs collaborations extérieures et internationales. V. Frangeskou (Chypre) a examiné la littérature conciliaire. Les commentaires du Pseudo-Nonnos (J. Nimmo Smith), de Maxime le Confesseur (l'équipe du Prof. Van Deun) et de Basile le Minime (T. Schmidt) sont entièrement ou partiellement édités de manière scientifique. K. Demoen et C. Crimi ont largement exploré la littérature de la période iconoclaste.

Afin de centraliser les informations et de les systématiser, une base de données a été mise en chantier et compte actuellement plus de 1500 entrées. Jusqu'ici, le relevé systématique des citations a surtout porté sur les florilèges, les œuvres de Justinien, Maxime le Confesseur et Jean Damascène.

Bibliographie: voir la Bibliographie en ligne du site.

Manuscrits des commentateurs: voir Manuscrits des commentaires grecs des Discours.

Base de données de la tradition indirecte: en chantier. Toute proposition de collaboration ou communication d'information peut être adressée au Prof. Andrea Schmidt (schmidt@ori.ucl.ac.be).


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